Prairies naturelles et bocages: des réservoirs de biodiversité à protéger

Entre pressions agricoles et pressions d’aménagements, en Brière comme ailleurs, les prairies naturelles sont menacées. Avec elles, ce sont de véritables pépites de biodiversité qui pourraient disparaître. Du 19 au 21 octobre, à l’occasion du congrès national des Parcs naturels régionaux qui aura lieu en Brière, élus, agents et chercheurs de toute la France se penchent sur ce sujet.

« Les prairies naturelles sont un type particulier de prairies permanentes. Il s’agit d’habitats dont les sols n’ont été ni retournés ni enrichis avec des intrants chimiques depuis plusieurs décennies. Cette typologie de prairies a la particularité d’accueillir une grande diversité d’espèces de la faune et de la flore, dont certains sont vulnérables ou en danger d’extinction (flore, reptiles, pollinisateurs…) », explique Yann Lozachmeur, chargé d’opérations pour le Parc naturel régional de Brière. Dans le cadre de la démarche d’Atlas de la Biodiversité, le Parc naturel régional de Brière a élaboré, depuis trois ans, la carte d’identité de la biodiversité de l’ensemble des communes du Parc comme Sainte-Reine-de-Bretagne, Missillac et Pontchâteau. Cet inventaire a permis, non seulement, de recenser les espèces, mais également de localiser précisément des prairies naturelles, véritables refuges pour la biodiversité.

Deux années d’études en Brière sur le rôle essentiel des prairies et des haies

« Dans le cadre de la démarche des Atlas de biodiversité communale, nous avons relevé le défi d’étudier différents systèmes de haies replacées dans un contexte de prairies adjacentes, permanentes ou temporaires », décrypte Olivier Lourdais, chercheur au CNRS de Chizé, spécialiste des reptiles et amphibiens. « Nos premiers résultats indiquent que les haies qui bordent des prairies permanentes sont associées à une diversité et une abondance en reptiles plus importante que celles associées aux prairies temporaires ou aux cultures ». De récentes études menées par le CNRS, dans les Deux-Sèvres ou en Loire-Atlantique, démontrent clairement l’impact de la disparition d’éléments semi-naturels (comme les prairies naturelles, les haies, les mares et les petits boisements) sur le déclin des effectifs de reptiles et d’amphibiens. « À Bouvron, en 18 ans de transition vers une agriculture intensive, avec des cultures de grands champs et de céréales, nous avons constaté un déclin de 92 % de la population de vipères péliades et de 74 % de lézard vert ! Dans les Deux-Sèvres, une autre étude démontre que le nombre d’espèces de reptiles et d’amphibiens est positivement influencé par la densité en haies et petits boisements. Un paysage de bocage en bonne santé, c’est donc un paysage où vous trouvez des haies et des prairies préservées », poursuit le chercheur.

50 cm pour la biodiversité

« Pour que les haies jouent ce rôle de refuge, pas uniquement pour les reptiles ou les amphibiens, mais aussi pour les invertébrés, les mammifères ou les oiseaux, il ne s’agit pas de mettre la nature sous cloche », prévient Olivier Lourdais. « Il suffit, par exemple, de sensibiliser le public et les gestionnaires à la conservation de haies de qualité, c’est-à-dire multistrates : à la fois arborées et arbustives avec à leur pied, un ourlet enherbé, très favorable à la faune ». Actuellement, les pratiques mécanisées (gyrobroyeur) sont dévastatrices pour la structure des haies. Maintenir une largeur de bande enherbée en pied de haie est pourtant une mesure simple et efficace. « C’est le projet que le Parc naturel régional de Brière et le CNRS cherchent à mettre en place. “50 cm pour la biodiversité” : un petit effort pour nos sociétés, mais de grands bénéfices pour la nature ! »

Concilier pratiques agricoles et biodiversité, c’est possible !

« Les paysages de bocage sont à tort considérés comme des paysages anciens. En réalité, ils sont d’une extrême actualité et illustrent des pratiques durables ». L’élevage extensif, parce que c’est une agriculture d’intensité moindre et respectueuse des paysages de bocage, trouve en effet toute sa place dans les transitions agricole, alimentaire et climatique actuelles. « En Brière, une partie des prairies naturelles est entretenue par des agriculteurs qui reproduisent des pratiques traditionnelles. Par ces actions, ils participent à la préservation d’espaces remarquables et aux services écosystémiques associés. Ces prairies naturelles méritent d’être préservées, valorisées ou encore restaurées. Il en est de même pour les pratiques agricoles paysannes qui y perdurent ».

Malheureusement, face aux fortes pressions sociétales (guerre en Ukraine, contraintes énergétiques, désintérêt du consommateur pour la viande, tension fourragère liée au changement climatique, perte d’attractivité du métier d’éleveur…), la tentation peut être grande de modifier ces pratiques… « Il est temps d’arrêter de réfléchir en surfaces de production et en augmentation de rendement, mais plutôt en termes de services que nous rend la nature », conclut Olivier Lourdais. « Le concept “One Health” fait le lien entre la santé humaine, la santé animale et l’état écologique de nos milieux et le bocage y trouve toute sa place. ».

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