Baptiste Hubert est entomologiste et chargé de mission au GRETIA, le Groupe d’étude des invertébrés armoricains. Avec son collègue Franck Herbrecht, il a participé de mai à septembre aux inventaires des hyménoptères aculéates (abeilles et guêpes) sur six sites, dans le cadre de l’axe 1 du projet « pollinisateurs sauvages » porté par le Parc naturel régional de Brière. Il nous explique la démarche.
Pourquoi est-ce important de protéger les pollinisateurs sauvages ?
La pollinisation joue un rôle central dans le maintien des écosystèmes en bon état de conservation. La reproduction d’une grande partie des plantes à fleurs, dont certaines sont cultivées comme des espèces fruitières (pomme, poire…), maraîchères (courgette…) ou de grande culture (colza, tournesol) dépendant des insectes pollinisateurs. Si le nombre de ces pollinisateurs diminue, que ce soit en termes de densité ou de diversité d’espèces, la fonction de pollinisation en sera affectée. À long terme, c’est une question de survie pour ces plantes. J’aime aussi rappeler qu’au-delà de l’aspect utilitaire ou économique, nous nous devons de protéger ces pollinisateurs parce qu’ils sont une part essentielle de notre héritage naturel, au même titre que d’autres éléments de notre patrimoine.
Pourquoi avoir ciblé les dunes et les landes pour cet inventaire ?
Nous avons donc décidé de travailler, dans un premier temps, sur les landes et les dunes, car ces milieux possèdent une forte originalité, notamment dans la composition de leurs peuplements d’insectes. Par exemple, les landes abritent des espèces associées aux plantes de la famille des éricacées, comme les bruyères. Ces milieux sont également fortement menacés et en régression, ce qui ajoute à leur importance écologique. Les dunes, quant à elles, sont des milieux à très forts enjeux pour ces insectes, abritant une grande diversité d’espèces. Il ne reste malheureusement plus beaucoup de dunes intactes sur le territoire, du fait des multiples pressions qui s’y exercent.
Comment avez-vous déterminé les trois sites de dunes et les trois sites de landes ?
Nous avons cherché des sites connus pour abriter une forte biodiversité afin de servir d’état de référence. Pour cela, nous nous sommes appuyés sur plusieurs sources : les Atlas de la Biodiversité Communale (ABC), notre connaissance historique des milieux et l’expertise de nos partenaires locaux. D’autres facteurs ont également influencé notre choix, comme leur accessibilité. L’ensemble de ces critères nous a permis de sélectionner parmi les sites a priori les plus intéressants, à savoir : la Bôle de Merquel, les dunes de Pen Bron à La Turballe et les dunes de Bonne Source à Pornichet et, pour les landes, l’étude porte sur celles de Cambéniac à Crossac, de la Tariole à Herbignac et des Caves à Pontchâteau.
Comment se sont déroulés ces inventaires sur le terrain ?
Les inventaires se sont déroulés de mai à septembre, en tenant compte des conditions météorologiques, car ces insectes sont pour la plupart actifs uniquement par temps ensoleillé, chaud et peu venteux. Nous avons capturé les insectes en utilisant différentes méthodes : un filet à papillons (filet entomologique) et un système de piégeage qui consiste à placer des coupelles de couleur blanche et jaune qui imitent les fleurs et attirent les insectes pollinisateurs. Les insectes seront ensuite analysés en laboratoire, car il est impossible de les identifier directement sur le terrain. La plupart d’entre eux sont très petits, mesurant souvent seulement quelques millimètres, ce qui rend leur identification complexe. Nous avons déjà commencé le travail de préparation et d’identification des spécimens récoltés, afin de dresser des listes d’espèces pour chaque site étudié. Ensuite, nous analyserons ces données (nombre d’espèces observées, présence d’espèces rares ou menacées, relations entre ces espèces et les différents milieux étudiés), afin d’évaluer l’intérêt de chacun de ces sites pour les pollinisateurs. Nous pourrons alors effectuer, si besoin, des recommandations pour la restauration des habitats.
Pourquoi le GRETIA travaille-t-il avec le Parc naturel régional de Brière sur ce sujet ?
Le Parc est un acteur clé dans la connaissance du patrimoine naturel. C’est un partenaire qui possède une implantation locale et une expertise sur son environnement. En travaillant ensemble, nous pouvons non seulement enrichir la connaissance scientifique sur les invertébrés, mais aussi diffuser cette information de manière efficace auprès des habitants et des différents acteurs du territoire du Parc naturel régional de Brière. Durant les inventaires d’insectes pollinisateurs, nous avons également été accompagnés par des agents du Parc que nous formons à l’étude des invertébrés. Cela fait partie intégrante de notre mission et nous tenons à transmettre ces compétences pour renforcer la connaissance locale.