Un projet pour préserver la nuit sur notre territoire
Pour de nombreuses espèces, l’éclairage artificiel peut être perçu comme un obstacle infranchissable pour se nourrir, se reproduire, nidifier, se déplacer, etc. Pour préserver la qualité de la nuit, le Parc naturel régional de Brière, s’est engagé dans une démarche de Trame noire sur le territoire depuis 2023.
Alors que, chaque soir en France 11 millions de lampadaires, plus de 3,5 millions d’enseignes lumineuses et des millions de lumières bleues s’allument, le Parc naturel régional de Brière engage une réflexion sur l’éclairage artificiel et ses impacts sur le vivant, en partenariat notamment avec Territoire Énergie 44, 22 communes du Parc et trois intercommunalités (Saint-Nazaire Agglo/La CARENE, CAP Atlantique La Baule-Guérande Agglo et le Pays de Pont-Château Saint-Gildas-des-Bois communauté). « C’est un débat d’autant plus important à l’heure de la nécessaire sobriété énergétique et du changement climatique », déclare Sophie Robin, Cheffe de projets biodiversité et appui aux territoires au Parc naturel régional de Brière. En effet, outre le fait de restaurer un équilibre naturel propice à la faune et à la flore, l’optimisation de l’éclairage public vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) et à diminuer la consommation d’énergie des collectivités territoriales.
Certains animaux plus sensibles que d’autres
En perturbant le cycle biologique « jour-nuit » des animaux en modifiant ou en empêchant le déplacement de certaines espèces, qu’elle attire ou qu’elle repousse, la lumière artificielle est une source de perturbation pour la biodiversité. Près de 30% des vertébrés et 60% des invertébrés sont impactés par la lumière artificielle de nuit. Certains animaux, du fait de leur vision adaptée à l’obscurité, sont plus sensibles que d’autres à la lumière, comme la vingtaine d’espèces de chauves-souris, les quatre espèces de rapaces nocturnes ou encore les centaines d’espèces de papillons de nuit connues sur le territoire.
Si les impacts de la lumière artificielle sur les animaux (y compris l’Homme) sont aujourd’hui largement documentés, ces effets sont aussi marqués sur la flore. La désynchronisation du jour et de la nuit entraine des floraisons précoces, des retards dans la chute des feuilles, et rend ces espèces vulnérables aux agressions (gel, etc.).
Un projet qui s’articule autour de cinq axes :
Un groupement de bureaux d’études (écologues, concepteurs et ingénieurs lumière) travaille sur un ensemble de cartographies du réseau écologique nocturne, la trame noire, en confrontant les données d’éclairages artificiels (publics et privés) à celles du patrimoine naturel local. À la suite de ces travaux, des prescriptions techniques d’éclairage par niveau d’enjeu, et donc par secteurs géographiques, seront proposées.
D’ici la fin de l’année 2024, ces résultats seront accessibles à l’ensemble des partenaires du projet (collectivités, acteurs économiques et associatifs) dans l’objectif de faire prendre conscience de l’importance du lien entre l’éclairage artificiel de nuit et le patrimoine naturel remarquable de notre territoire.
Le Parc naturel régional de Brière en lien avec Territoire Énergie 44 et les EPCI, poursuivra l’accompagnement opérationnel auprès des communes afin de mettre en place des actions en faveur d’un éclairage plus sobre tout en tenant compte des usages de la nuit. Élus et techniciens seront informés des enjeux de pollution lumineuse à travers des formations, des ateliers et sorties nocturnes dans l’objectif d’adapter leur parc d’éclairage, vers une gestion différenciée de la lumière. Éclairer oui, mais éclairer juste : là où cela est nécessaire, quand cela est nécessaire et avec le moins de nuisance possible.
Les habitants sont acteurs de la démarche, notamment à travers des sciences participatives ou sciences citoyennes. Aussi, les divers ateliers et sorties nocturnes proposés chaque année sont un moyen de fédérer des publics variés, attirés par de multiples sujets (biodiversité, santé humaine, astronomie…). Dès cet automne et suite aux premiers ateliers « Raconte-moi ta nuit » avec l‘Observatoire de l’Environnement Nocturne en 2023, de nouvelles déambulations nocturnes dans les centres bourg seront organisées avec l’appui des experts du groupement de bureaux d’études. Ces déambulations permettent aux habitants d’appréhender le paysage nocturne de leur commune et de s’interroger sur la place de l’éclairage (pour qui ? pour quoi ? et quand ?). Au-delà de l’espace public, les habitants seront également sensibilisés à la sobriété lumineuse de leur logement (jardin, façade…).
Les scolaires, quant à eux, sont sensibilisés aux trames paysagères à travers un projet fédérateur « Trame verte, bleue et noire ». Chaque année, 6 classes du territoire sont invitées à découvrir les paysages qui les entourent et à comprendre les impacts des activités humaines sur l’environnement. Ce projet scolaire a pour objectif de sensibiliser au rôle des réseaux écologiques, y compris nocturne, dans la préservation du patrimoine naturel.
Le secteur privé à travers ses enjeux spécifiques tels que la sécurité au travail ou encore la protection des biens, exige un éclairage finement adapté. C’est pourquoi, ces acteurs économiques pourront bénéficier, par ailleurs, d’un accompagnement spécifique (sensibilisation, recommandations techniques) en lien avec les EPCI et les partenaires, et en adéquation avec les impératifs de leurs activités professionnelles.
Les partenaires scientifiques participent à l’amélioration des connaissances autour de la qualité de la nuit sur le territoire. Les scientifiques de l’Observatoire de l’Environnement Nocturne du CNRS portent un projet de recherche sur la pression lumineuse en Brière : MITI-PLUM.
Construit en partenariat avec le Parc naturel régional de Brière et financé par la Mission pour les initiatives transverses et interdisciplinaires du CNRS, le programme MITI·PLUM (pour “Mitigation de la pression lumineuse”) s’inscrit dans une démarche de science citoyenne et poursuit un objectif d’amélioration de la qualité environnementale du territoire. Grâce aux données récoltées en continu par le réseau de capteurs, l’équipe de recherche expérimentera un outil d’aide à la décision en temps réel prenant en considération les facteurs d’aggravation de la pollution lumineuse par exemple la couverture nuageuse), les enjeux écologiques, avec un focus sur les oiseaux migrateurs, et les marges de manœuvre liées à l’acceptation par les habitants de mesures de réduction de l’éclairage public à échelles fines.
- Des affiches de sensibilisation pour comprendre les impacts de la pollution lumineuse sur nos paysages et le vivant,
- Un guide à destination des particuliers pour les sensibiliser à la qualité de la nuit et leur proposer des actions à mettre en place à titre individuel,
- Une exposition photo “Lumière sur la nuit” qui invite à nous interroger sur nos paysages nocturnes. Exposée à la maison du Parc naturel régional de Brière tout le mois d’octobre 2024 à l’occasion du Mois de la Nuit en Brière. ©Samuel Challéat, OEN, CNRS, P. Trécul, F.Bena, B. Duhamel, A. Martineau, P. Sabine, J. Faucher.
- Les actualités du projet à retrouver dans la Newsletter du Parc naturel régional de Brière et sur le site internet.
Photo ©Samuel Challéat, Observatoire de l’Environnement Nocturne, CNRS